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Posts tagged ‘Argentine’

La grange solaire : le design agricole et ses idées lumineuses

September 27th, 2009

Le pâturage naturel est le meilleur aliment pour un ruminant. Les vaches y trouvent tous les éléments pour constituer leurs défenses immunitaires et les protéines pour faire du muscle et du lait pour leur veaux. panopotreros2

Seulement, sous le Tropique du Capricorne, dans la région de Salta au Nord Ouest de l’Argentine, il ne pleut que les 3 mois d’été austral: Décembre, Janvier, Février. En trois mois, il tombe entre 1000 et 1500 mm d’eau, à peu prés ce qu’il tombe à Brest ou Bruxelles en un an. L’été, au Tropique, c’est aussi le moment où le soleil est à la verticale, au plus proche de la terre.

Dans ces conditions l’herbe pousse d’une manière spectaculaire. En générale l’herbe est le plus équilibrée en protéine et en sucre au moment de l’épiaison, lorsqu’elle fait ses fleurs. C’est à ce moment qu’on doit la récolter pour faire des réserves pour l’hivers optimum pour la nutrition.

Naïvement on pourrait croire que le maïs ou d’autres cultures, pourraient donner un plus grand rendement que l’herbe. Mais c’est faut. Non seulement le maïs n’est pas une nourriture pour la vache, il lui apporte trop de sucre qui ne fait pas de viande, mais de la graisse. Il suffit que votre vache se mette à gambader pour que cette graisse disparaisse immédiatement. Pa besoin d power plat, pas besoin de salle de gym.

En plus, un champs de maïs chez nous, cela donne 80 à 120 quintaux alors, avec l’herbe on dépasse rapidement les 200 quintaux voire sur certaines parcelles on est proche des 600 quintaux avec l’herbe naturelle. Ici on est sous les tropiques; le climat c’est ou trop ou pas assez, jamais au milieu; ce n’est pas une récolte et puis c’est tout; pendant 3 mois, toutes les 3 semaines une coupe nous fournit de 70 à 100 quintaux hectare, sans avoir besoin de labourer, rajouter de l’engrais… cela pousse tout seul. En plus c’est une assiette bien diversifiée, mélangeant plante nourricières, plantes appétentes et plantes médicinales, un repas complet.

Seulement pour conserver le foin, il doit être sec. Ici c’est impossible, il pleut tous les jours. Il faut donc trouver un truc. grange1C’est la grange solaire. Le toit qui protège de la pluie et sert de four pour produire de l’air chaud qui est diffusé au dessous du foin pour le sécher peu à peu.GRANGE2Le foin est apporté par l’autochargeuse devant la grange. Une pince distribue le foin dans la grange; puis prend le foin sec pour le déposer dans l’entonnoir qui amène le foin à la machine qui fait les rouleaux.GRANGE3Puis les rouleaux de foin sont stockés dans l’autre partie de la grange, avant d’être distribués dans des lieux de stockages où l’on en aura besoin.

Ici il y a 7 000 bêtes à nourrir l’hivers, lorsque le pâturage ne pousse plus. La surface utile de pâturage représente environ 20 000 ha. Cela en fait des kilomètres. Aucun déplacement de tracteur ou de pickup ne doit être fait à la légère. Il y a toujours des rouleaux à déplacer. 500 m3 de foin sont séchés par semaine. Une fois compressé en rouleau cela nous fait 200 rouleaux environ. En 10 semaines la grange est pleine. Il faut donc répartir le plus possible les réserve sur tout le territoire.GRANGE4Le principe de la grange solaire: l’air rentre sous le toit pour se réchauffer et être pulsé par un ventilateur sous le foin et expulsé une fois chargé d’humidité. Un calcul de thermodynamique doit être réalisé afin d’obtenir des températures constantes et ne dépassant pas les limites pour ne pas “cuire” le foin, ni le brûler. On doit toujours rester à 10°C au dessu de la température ambiante pas davantage. Il fait 35 à l’ombre, 80 au soleil. Au midi solaire ici on atteint facilement les 15kW/h/m2, ce qui est beaucoup; le flux d’air doit être donc calculé en conséquence.

Seul inconvénient : cette grange solaire a besoin de machines dont l’énergie serait trop onéreuse de produire par des panneaux photovoltaiques. Pour actionner le gros ventilateur et la pince de 1,5m de diamètre, qui coure sur son rail de 30m de long, nous sommes obligés de mettre un générateur qui fonctionne au diesel. Pour cela on lance un programme de fabrication de bio diesel à partir de micro algues qui digèrent le carbone des déchets agricoles. Il faut être autonomes, la première pompe à essence est à 2 heures de piste.

Les vaches nous parlent de santé

July 25th, 2009

vachefleurfaceL’essentiel des maladies de la vache proviennent de son alimentation.

C’est la biodiversité de sa nourriture qui construit ses défenses immunitaires; mais attention aux excés, ils peuvent détruire ces défenses immunitaires en un clin d’oeil.

vacheveau

C’est la même chose pour l’homme. Chez la vache cela se voit quasi instantanément; l’homme, on s’habitue à ses faiblesses passagères. La vache, un déséquilibre dans sa nourriture se répercute immédiatement sur son poil, au coin de ses yeux,  la propreté de son arrière train, le gras de son pelage, ses bouses… La vache nous parle de son état de santé en permanence : il faut l’observer et corriger son alimentation pour sa santé.

vachesale

Sinon ces excès vont provoquer des mamittes, des parasitismes, jusqu’à des avortements et des morts de veaux à la naissance.

Comment cela peut se produire ?

Un champs est dominé par le trèfle, la vesce et le lotier. Le trèfle n’a rien de mauvais en soi, bien au contraire il est essentiel pour la pousse des graminés; mais en excès ces légumineuses apportent trop d’azote au menu quotidien de la vache : tout de suite les bouses de vache deviennent de plus en plus liquides. vachegratte

Puis l’arrière train de la vache se salit; des petit cristaux noirs apparaissent aux coins des yeux; le ventre devient également sale et le poil du garrot part dans tous les sens. Quelques jours après, si son menu ne change pas, la vache commence à lécher son flan arrière, puis se gratter sérieusement et c’est un début de parasitisme…

Si les 2/3 du troupeau présentent les mêmes symptômes, il faut prendre la chose au sérieux et agir. Sans compter que dés que le trèfle blanc Trifolium repens fleurit il produit du cyanure; un petit veau ne peut pas y résister.

En fait il se passe exactement la même chose que si un homme faisait la feria et buvait en se goinfrant toute l’année. La vache, par ces signes, nous dit qu’elle mange plein de sucres qui fermentent ultra vite associés à trop d’azote… c’est la fête, seulement il faut de la modération en tout. Avec les signes qu’elle nous envoie, la vache nous montre qu’elle a besoin de fibres utiles; des fibres mûres constituées de sucres très lents.

Si l’on ne respecte pas ce que la vache nous dit, c’est la facture du vétérinaire qui va augmenter. Le fermier se met à investir dans une ribambelle de vaccins pour lutter contre une mamitte, un parasitisme, une langue bleu… en réalité il ne fait que casser le thermomètre, il ne fait que soigner le signe d’un déséquilibre bien plus profond sans s’attaquer au réel problème qui aura des conséquences bien plus graves à terme. Le problème résolu à un endroit, réapparaitra à un autre.

Ces observations qui étaient partagées par tous les éleveurs auparavant, ne sont quasiment plus enseignées dans les écoles d’agronomie. Le Dr Bruno Giboudeau, vétérinaire passionné d’alimentation a soulevé le problème en tentant d’apporter un solution aux éleveurs à travers sa méthode OBSALIM, Observation alimentaire, comme son nom l’indique. Chez SOS SOiL, nous sommes en plein dedans, en Amérique comme en Europe.

En fait, les excès sont bien plus graves que les carences. La vache est faites pour manger de l’herbe et de la fibre. Mais la grande majorité des fermiers aujourd’hui dans le monde leur donnent du mais et du tourteau de soja.

En Argentine plus de 80% des vaches sont élevées en Feed-lot, sorte de camp de concentration pour ruminants, avec comme nourriture du tourteau de soja OGM, résidu de la presse pour produire du biodiesel. Ces vaches en milieu artificiel n’ont plus les ressources pour fabriquer leurs défenses immunitaires et donc les vétérinaires locaux les bourrent d’antiparasites et de vaccins en tous genres… Aprés ces vaches sont mangées par l’homme; tous ces produits lui sont transmis…

Le problème réside aussi peut être dans un éblouissement par la course technologique qui pousse le fermier à confondre productivité et rentabilité. Les paquets OGM tout préparés, qui comprennent herbicides, fertilisants et semences génétiquement modifiées, augmentent de prix chaque année de 25 à 30%. Les médicaments et les vaccins… il en faut chaque année plus…

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Mais en France ou en Belgique, il n’y a pas officiellement de semences OGM… excepté lorsque ces semences sont achetées en Espagne et passées en France, sous l’oeil bienveillant du douanier, pour être plantées fièrement avec l’air malicieux du paysan rebelle à la loi… De toute façon ce tourteau de soja transgénique est importé du Brésol à moindre cout, quant on veut. Selon Greenpeace, chaque Français a abattu sans le savoir 450m2 de forêt amazonienne, dédiée désormais à la culture de soja transgénique pour nourrir ses vaches et faire du lait et de la viande.

Lorsque les vaches sont tout simplement envoyées paitre dans un beau pâturage; pour bien faire chaque année le paysan gardera un bout de sa terre pour faire du foin pour l’hivers…

Ce foin il voudra qu’il soit le plus riche possible et donc il y mettra toujours plus d’engrais. Toujours plus et voila dans le champs une explosion de pissenlits Taraxacum off. … c’est le stade 1, le champs devient tout jaune. Puis c’est au tour des boutons d’or et Ranunculus acris et des rumex obtus Rumex obtusifolia... C’est le stade 2, lorsque les nitrates du sol ont tendance à se transformer en nitrites pathogènes pour l’animal et pour l’homme qui mange l’animal ou qui boit son lait. Les nitrites 3+, forment des ions beaucoup plus actifs que les nitrates 2+, ils ont la particularité de flinguer tous les antioxydants. Alors attention.

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Là encore, bio ou non, l’agriculteur met de l’engrais sur son champs sans se poser de questions quant à l’état de son sol.

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Et puis, le fumier est-il réellement composté? Les bactéries ont elles eu le temps d’effectuer leur rôle? avec le froid de certaine région cela peut prendre des dizaines d’années… le tas de compost sur la photo est pathogène pour le bétail. Personne ne s’en rend compte et l’hivers venu les vaches vont en souffrir…

C’est pourquoi il est impératif d’observer également les plantes indicatrices. C’est elles qui peuvent nous renseigner sur la qualité du fourrage et l’action (ou l’inaction) qui doit être lancée pour assurer la santé du bétail.

Ainsi au cours de chaque mission nous tentons de former les paysans afin qu’ils puissent réagir le plus en amont possible, de manière à prévenir tout trouble de santé possible. Lorsque le paysan investit dans un diagnostique de 2/3 jours par nos soins, cela lui lui revient en général moins de 10% de ce qu’il devrait payer en vétérinaire et drogues en tout genre si l’on n’était pas intervenus. Notre but est surtout de le former afin qu’il reçoive les clefs d’une formation qui li servira pour toujours.

C’est ce que nous faisons en Europe, en France, en Belgique, en Espagne, où nous avons des viandes fabuleuses, mais surtout, c’est ce que nous avons la chance de faire en Argentine, que nous aimerions voir re-produir cette viande qui était la meilleure du monde comme au siècle précédent.

C’est un travail de passionné qui demande une rigueur ferme au niveau de la traçabilité de la bête, mais aussi de la durabilité de la production, au niveau de sa nourriture avec les meilleurs pâturages naturels, de son emprunte carbone avec le recyclage des pollutions que produisent 7000 bêtes sur 40 000ha et surtout dans la préservation des espaces sauvages qui sont des puits sans fonds de biodiversités et des recours quotidiens apportant des solutions tant pour la santé des bêtes que pour le devenir du domaine.

Enfin si l’on aime la viande, il faut que cela soit un plaisir d’exception. Il ne faut pas en manger tous les jours, seulement accepter le meilleur, des meilleures provenances. Un quinotto, un plat de céréale et légumineuse bien cuisiné sont équivalent en protéine à un steak de boeuf,  mais 10 000 fois inférieur en énergie équivalente pour le produire, donc d’une empreinte carbone bien moindre. C’est pourquoi la viande doit rester un plaisir d’exception. Comme pour les vaches, il faut que nous multiplions la biodiversité de nos aliments pour diminuer la facture de notre médecin…

La navette spatiale Atlantis travaille pour l’agriculture

May 12th, 2009

Pendant que tout le monde s’intéresse au futur du satellite Hubble, nous avons mis la navette spatiale Atlantis de la NASA au service de l’agriculture grâce à notre génial collaborateur Alain Gachet.

Pendant ses révolutions autour de la terre, la navette spatiale Atlantis mitraille notre planète de photos et de détections radar qui plongent jusqu’à 30m sous le sol. Ces images sont récupérées par Alain qui les décrypte à sa manière. Alain, ingénieur de l’Ecole des Mines de Paris, grand explorateur de terrain et géologue trouveur de pétrole pour Elf/Total pendant 20ans, connait la morphologie de la terre mieux que tout. Avec les images de la navette spatiale, il épluche littéralement la terre comme un oignon, et met à jour toutes ses strates.

Grâce à ce travail nous trouvons de l’eau pour l’agriculteur. Exemple du traitement d’image radar au Pérou, à Lambayeque, un terrain désertique épuisé par les mauvaises pratiques agricoles de l’homme qui a accéléré la tendance du lieu à se désertifier.

sasape-imag-satelite-bajaVoici le domaine pour lequel nous sommes consultés plaqué sur l’image satellite de surface.

Perou_SASAPE Watershed3

Alain passe à l’image radar pour comprendre comment fonctionne l’eau dans cette géologie; où sont les bassins collecteurs, dans quelle direction se versent-ils; quels sont les points GPS exacts où l’on doit forer pour avoir une source d’eau de manière durable; à quelle profondeur doit-on forer.

Ici nous nous interessons uniquement aux réserves d’eau qui se renouvellent en permanence. Nous ne touchons absolument pas aux nappes phréatiques qui pourraient s’épuiser par une mauvaise gestion et créer une catastrophe naturelle à long terme.

Perou_SASAPE Water2Sur cette image nous sommes sous le sol, nous suivons les mouvements de l’eau. En surface on ne se doute de rien.

sasapesurfaceToujours plus profond nous allons à environ -30m.

Perou_SASAPE relief2

En utilisant cette technique Alain a pu trouver de l’eau pour le Darfour. Les Nations Unies par la voie du directeur général de l’Unesco viennent de le remercier d’avoir été à l’origine du sauvetage de plus de 300 000 réfugiés au Darfour. Désormais le Pentagone en a fait son allié pour de nouvelles mission pour trouver de l’eau en Irak, en Afghanistan, en Ethiopie, en Somalie…

Pour l’agriculture le travail d’Alain nous permet de prendre du recul et comprendre comment le terrain fonctionne. Il nous permet de comprendre les processus d’érosion et d’évolution du terrain en macro échelle.

Exemple en Argentine : là nous voyons l’Amérique du Sud depuis la navette spatiale

pampa-grande-argentina-location-mapLes carrés noirs sont vraisemblablement des espaces censurés par les Américains, peut être l’armée? Bon rapprochons nous du domaine :

salta-zoomed-area-landsat-3d2Toujours plus prés. Bon là on a visé un peu trop haut; on tombe sur le lac dans lequel se verse l’eau qui vient de l’estancia que nous conseillons.

coronel-mandes-synclinorium2Descendons un peu et traitons l’image de manière à pouvoir comprendre l’évolution géologique, les différentes roches en présence, l’impact et le travail de l’eau sur le terrain.Tout d’abord une image d’ensemble traitée de manière à avoir une bonne idée des grandes tendances édaphiques de la région.

pampa-grande-argentina-location-map1-2Grâce à cette image nous comprenons tout de suite l’impact climatique sur le domaine pour lequel nous sommes consulté.

L’eau vient intégralement des nuages en provenance de l’Amazonie. Nous sommes pieds et poings liés au devenir de la fôret dense. Tous les flan Est sont verts. La propriété se trouve exactement à la frontière avec le début du désert. Une position trés fragile qui nous poussera à être trés prudents et à rechercher tous les moyens pour amortir les effets du réchauffement de la planète. Au vu de cette image, ce doit être notre première priorité :rendre vert ce domaine qui ne l’est pas vu de l’espace, planter de arbres, mieux gérer les ressources d’eau.

Rapporchons nous un peu plus.

fond-landsat-7-4-2-et-transectsDécidément le terrain est bien moins vert qu’il ne pourrait être, bien moins que les espaces non touchés par l’homme. Que se passe-t-il?

fond-topo-couleur-et-transectsToute l’eau du domaine se dirige vers B’ et l’on dirait que rien ne pousse là.

Etudions les coupes de terrain que nous fournit la navette depuis l’espace :

coupe-abTout le domaine est en érosion totale. Nous sommes en présence d’alluvions qui partent toutes vers la rivière. Voyons de l’autre côté sur les autres axes choisis sur le domaine sur de grandes distance afin de mieux comprendre le phénomène :

coupe-cdCe qui sur le terrain semble plat ne l’est en fait pas du tout. La composition du sol rend la situation trés préquaire à long terme. Nous sommes en fait en phase de transformation en canyon. La situation est grave mais pas irréversible si l’on se met tout de suite au travail. Il faut protéger les endroits qui montrent des signes d’érosion avec beaucoup plus de sérieux que nous le pensions après notre étude de terrain. Il faut circonscrire les lieux en danger de tout accés du bétail. Rapprochons nous :

zoom-pampa-grande-landsat-transectscoupe-ab1Si nous ne faisons rien tout va tomber. Il faut stopper tout utilisation de produits chimiques pour desherber, interdire le glyphosate sur le domaine, car il faut renforcer par tous les moyen ce qui peut stabiliser les alluvions. Préserver la mooindre plante qui puisse retenir le sol de partir avec l’eau et la pente. Il faut planter des arbres pour empêcher l’érosion.

Sans l’expérience du terrain nous n’aurions pas cette analyse bien sûr, mais l’imagerie fournie par la navette spatiale et les connaissances et l’interprétation d’Alain Gachet, nous permettent désormais de placer nos priorités. C’est une révolution pour l’agriculture et le développement durable.

La navette spatiale nous conforte dans notre choix d’agriculture naturelle pronée par le vieux sage Masanobu Fukuoka. Utiliser tous les moyens pour comprendre la nature et tenter de s’en faire une alliée pour cultiver et nourrir les hommes.

Argentine 5 : transformer une pollution en biodiesel

April 18th, 2009

entreepgmaisonLorsque nous sommes arrivés dans ce territoire de 40 000 ha, la politique agricole avait été complètement bouleversée depuis 4 ans. Les anciens propriétaires n’avaient pas d’argent à investir dans ce lieu; on faisait avec les moyens du bord. Les nouveaux propriétaires ont fait appel à des ingénieurs agronomes modernes qui ont pris les choses en main, pour le meilleur et pour le pire.

Avec cette modernité apparait l’utilisation de produits chimiques comme remède à tout: on veut démaquiser, un coup de 24D, on veut désherber avant de planter, un coup de glyphosate et des semences OGM résistantes au glyphosate, on veut nettoyer cours d’eau et canaux d’irrigation, un coup de 24D mélangé au 245T additioné de chloromethane et d’un détergent pour faire mieux pénétrer les produits chimiques dans les plantes… (mélanges tristement célèbres… agent orange, agent rouge, agent blanc… couleurs que l’artificier américain choisissait pendant la guerre du Vietnam selon la topologie du lieu à attaquer).

Lorsque l’on a affaire à autant de produits à faible capacité de biodégradabilité lachés dans la nature, nous parlons de bioaccumulation; un concept qui n’est qui n’est que trés peu pris en compte par les institutions de surveillance et controle, voire jamais.

Ces produits chimiques sont utilisés pour désherber, donc toutes les plantes locales disparaissent et font la place belle aux plantes d’origines étrangères… en observant bien l’on se rend compte sur les champs aspergés qu’une semaine plus tard ces plantes sont encore là en tout petit, mais avec de nouvelles plantes… d’où une deuxième voir une troisième aspersion. Le glyphosate, 24D, etc. sont tous issus de la recherche pendant la guerre de ICI en Angleterre et Dow Chem aux US pour aider à apporter une fin radicale à la 2nd guerre mondiale en aspergeant les champs des nazis pour les faire creuver de faim.

galega-cigue2Nous parlerons des incidences sur les animaux déclenchées par l’utilisation intempestive de cette chimie plus tard. 2 semaines d’études systématiques approfondies sur ce lieu précis nous montrent que l’aspersion de cette chimie herbicide provoque ici, dans cette vallée, par la suite, la prolifération de 2 plantes: le galega officinal, et la grande cigue; toutes deux sont d’origine méditerranéenne.

Le galega est une plante légumineuse qui en Europe est réputée pour son utilisation contre le diabète. Ici comme le bétail n’en veut pas, elle est considérée comme une indésirable. Gérard Ducerf qui avait une commande de galega officinal par un laboratoire pharmaceutique avant de venir en Argentine était dégouté. En Europe impossible de mettre la main sur cette plante en quantité suffisante pour le labo, ici il y en a des tonnes mais impossible à récolter car sur un terrain aspergé de chimie.

La grande cigue, tout le monde la connait, c’est un poison violent rendu célèbre par Socrate.

cigueirrigation2homme2Au dessus, vous voyez une bande blanche de cigue apparue 2 semaines après le passage du monsieur à droite qui asperge le mélange désherbant local décrit plus haut.

24-d245tVoila les deux mollecules essentielles du desherbant. Comme on le voit nous sommes en présence d’hexagones de carbones avec trois doubles liaisons chacun… quasi impossible à biodégrader… mise à part la combustion, tout aussi polluante… lesfoodingues utilisent des champignons et quelques bactéries pour préparer les terre en effectuant un tel tour de force.

ciguedianMais voila, sur une grande superficie cela peut avoir des conséquences dramatique. Un passage de glyphosate et 2 passages de 24D ont provoqué la prolifération de la grande cigue sur 30 ha… Et là il n’y a plus rien à faire. Plus on asperge plus elles reviennent.

D’un côté c’est bien qu’elles reviennent car elles ont un rôlede dépollution à assurer et de restructuration des sols à effectuer après une attaque chimique qui a eu un impact certain sur la flore microbiologique du lieu. Quand la plante indicatrice de pollution est un poison violent c’est une autre chose. La cigue dans ce biotope précis joue un peu le rôle chez nous de l’Ambrosia artemisiafolia. Le rôle d’un indicateur de pollution grave par une plante mortelle pour l’homme qui cependant peut devenir un médicament dans les dosages had hoc.

cigue-represa22Les chevaux rentrent dans ce champ de cigue de 2m de haut, les oreilles en arrière, c’est à dire avec la plus grande appréhension. Un homme en combinaison de cosmonaute pourrait débroussailler… mais c’est ultra dangereux l’homme a produit là plus de 30 hectare de poison mortel. La plante a son rôle de dé-pollution à jouer, après elle disparaîtra… mais quand brûler le champ? Nous risquerions de créer des vapeur de cyanure tout aussi nocive que la plante… Trop dangereux. Il n’y a plus rien à faire.

Voila où nous intervenons:

Au milieu de la vallée, il y a une rivière. A la fin, un goulot à travers la montagne. Que se passerait-il si nous inondions le champs? Nous aurions la production de méthane, de carbone fossile, de CO2 et de cyanures et de nitrites…l’enfer. Mais sans s’en rendre compte nous venons là de recréer une micro planète des temps géologiques qui ressemble au quotidien du précambrien… le Protérozoique. La chose intéressante dans la botanique est que des bactéries aux blé ou aux orchidées tous les ages géologiques du vivant sont représentés… c’est l’évolution de ces êtres qui a préparé la terre pour notre propre développement, nous humains.

Alors qu’est ce qui vivait au précambrien? des micro algues… Ces micro algues utilisent le cyanure comme une sorte d’engrai et transforment le CO2 en oxygène. Elle se reproduisent toutes les 6 heures environ et lorsqu’elles sont mûres leur corps est composé de 30 à 60% environ d’huile. Résultat: ces micro algues dépolluent, produisent du bio diesel et le reste de protéines avec des vitamines et de la chlorophylle.

Sur 30 ha nous allons pouvoir produire suffisamment de diesel pour la propriété, fuel de chauffe comme diesel pour les voitures et les tracteurs et le résidu? du tourteau d’algue qui pourra complémenter la nourriture du bétail l’hivers et si le besoin se fait sentir il pourra être utilisé comme engrais pour les cultures.

Cette algue peut-elle devenir envahissante et polluer tous les cours d’eau? Non, car elle est trop haute dans la chaine alimentaire et peut nourrir tout le monde. C’est un véritable bonbon. C’est bien le problème d’ailleurs. Une fois l’endroit dépollué et cette algue développée, quelle quantité échapera-t-il de la prédation (poissons, batraciens, oiseaux…)? La production d’algue assez conséquente, avec une estimation suite aux essais en laboratoire de 90tonnes ha/an.

Désormais les foodingues sont en train d’affiner la sélection de la bonne algue et de créer un design adapté à l’endroit, pour récolter et faire le process pour presser et séparer le tourteau de l’huile. Une vrai création qui permettra à terme de libérer les fermiers des contraintes énergétiques.

Si la production d’algues se développe comme prévu, la pollution sera maintenu à terme en versant dans cet espace les peaux des noix afin de fournir le carbone et le cyanure nécessaire à l’algue. Ce serait une manière idéal de se débarrasser des résidus de la culture de noix qui pourrait devenir une pollution conséquente vu les surfaces considérables de noyers (400 arbres sur 50 ha).

Si cette production d’huile n’est pas suffisante… l’algue aura servit de dépollueur et sauvera la vallée d’une contamination au cyanure et de dégagement de gaz à effet de serre. Donc un bilan positif quoiqu’il arrive.

Mission Design Agricole – Argentine 4 / Comment s’intéresser à la nature peut devenir intéressant pour un agriculteur : Biodiversité de plantes à huile essentielle, médicinales ou ornementales sauvages pouvant être exploitées ou cultivées

March 23rd, 2009

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Ce maquis touffu, jusqu’ici considéré comme gênant le bétail ou toute autre production, est en fait un trésor vivant :

Il protège des dizaines de variétés de colibris et oiseaux mouches (bien trop difficiles à photographier!), sans parler des aigles, vautours et autres rapaces, dont 6 nids du plus majestueux d’entre eux le grand condor… et aussi un couple de grande Outarde Kari, oiseau spectaculaire rarissime dont le mâle dépasse les 1m20. Aussi les “Quaras”, les petits lamas sauvages et les grands chats “Cougars” qui se partagent le territoire.

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Lorsque l’on s’occupe de bétail, le Cougar peut devenir un grand atout : Le bétail sait se défendre contre lui, mais sa présence le garde en alerte et le fait bouger. Lorsqu’il remplit son rôle, le cougar devient un allié essentiel contre le surpâturage et en outre, fait office de nettoyeur en éliminant toutes les bêtes blessées ou malades.

La nature joue son rôle. Il faut observer, comprendre et laisser faire.

Revenons aux richesses de cette imménsité de maquis. Tout d’abord la biodiversité : nous sommes sur le biome primaire du tabac! ici il y en a de toute sorte. Diana voulait arrêter de fumer, à chaque fois qu’elle ramenait une plante c’était une variété de tabac. Les photos qui suivent sont pour les amateurs de cette plante sacrée…

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Il faut commencer par la plante qui réunit les Dieux et les hommes et intercède pour la paix auprès des anges, celle qui est pollénisée par l’oiseau mouche. Il faut maintenir le tabac sauvage à tout prix pour abriter l’oiseau magique. (le tabac en haut à gauche est le tabac glauque, qui se fume sans avoir besoin de le faire fermenter). Aux USA les tribus d’indiens parquées sont en train de retrouver le sens et le lien que cette plante a toujours constitué pour leur civilisation. Arrêter de fumer et s’intéresser au rite véritable du tabac est une manière pour eux de fuir la banalité du quotidien, de retrouver le partage fondateur de leur culture, de retrouver leur identité. Cette plante est l’homme.

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Et maintenant les huiles essentielles : tout d’abord la verveine odorante arbustive, Aloisia sp., celle qui a fait la fortune des parfumeur de Grasse, l’Eau du Coq, l’Eau de Cologne… au XVIII eme siècle cette plante fut importée d’ici pour être plantée aux bords de la méditerrannée. Nous sommes sur son biotope originel, là où elle exprime le mieux sa force et la palette complète de ses nuances olfactives. Nous sommes ici en face de de tonnes d’essences olfactives; l’exploitation peut commencer. Il faut la pratiquer de manière durable, afin de préserver son caractère sauvage. L’huile essentielles doit être produite selon la technique française, à la vapeur continue en empêchant tout risque qu’une goutte huile recuise et ne devienne carcinogène. Les extraits des autres plantes vont être analysés au laboratoire de l’université de Tucuman pour définir l’intérêt et la composition de leurs huiles.

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Les nourritures sauvages sont pléthorique sur le territoire, mais plus intéressant encore sont les plantes qui sont à l’origine de quelques’une parmi les plus importante pour notre alimentation mondiale, la pomme de terre sauvage dans son biotope primaire, à l’origine de toute celles du monde, une sorte de potiron sauvage, des petits pois accompagnés d’ail sauvage américains (pour ceux qui disent qu’il n’y a pas d’ail originaire d’amérique)… mais aussi plus loin le merceilleux sureau des Andes qui prend des dimention arbustives impressionnante, le délicieux Berberis-épine vinette, le pêcher sauvage, des radis sauvage et le fameux maca des Andes, navet à l’arome chocolaté amère aphrodisiaque et hyper concentré en minéraux, dont le marché ne cesse de croître dans le monde entier.

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Et sur les frondaisons des lapachos, la Uncaria tomentosa, la griffe de chat, qui a le bon gout de fleurir en alternance avec son arbre support. Le lapacho est l’arbre mythique du Nord Ouest de l’argentine, un grand arbre au fleur rose. Comme la liane Uncaria, cet arbre figure sur la liste des plantes prioritaires de l’OMS, Organisation Mondiale de la Santé, comme médicament pour lutter contre le cancer. La production de ces deux plantes peut se faire en permaculture, l’une soutenant l’autre.

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Begonia blanc, rouge, hypomeas, arum, uncarias, solenaceas, cacti, lianes… tant de plantes sauvages que nous connaissons domestiquées dans nos jardins européens. En tout état de cause, il en reste plein à dompter…

Comme ce jasmin géant arbustif, Mandevilla sp., aux senteurs enivrantes

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Il n’y a pas que le bétail, le soja et les céréales à cultiver! Il faut être à l’écoute de la nature et elle vous guidera vers de nouveaux horizons. C’est tout l’art du design agricole, que de mener cette opération afin d’obtenir des produits intéressants à la clé, qui puissent séduire une clientèle sans être à la merci de distributeurs et de marché de matières premières, insécures et impersonnels.

Mission Design Agricole – Argentine 3 / La biodiversité qu’il faut préserver à tout prix

March 22nd, 2009

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- Les pâturages avec leurs cocktails de plantes médicinales et de rubiacées pour avoir un rendement optimum de viande que seule la nature peut procurer :

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- des insectes auxiliaires pour éliminer les insectes nuisibles et des insectes nécrophages qui transforment les bouses en engrais.

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- Psylocibes et champignons nécrophages qui transforment le carbone en sucre, qu’ils échangent avec les plantes directement à leurs racines grace à leur réseau mycelien.

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Tous ces êtres sont les meilleurs alliés de l’agriculteur, lui garantissant un pâturage riche et sain.

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Mais voila, trop nombreux sont ceux qui l’oublient et préfèrent des méthode radicales.

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Voila deux molécules organochlorées qui ont été inventées en 1942 pour mettre fin à la seconde guerre mondiale en éradiquant toute vie sur le sol, toute culture, défoliant toute végétation. Mélangées à des détergents pour leur permettre de pénétrer plus facilement dans les cellules vivantes, elles sont devenues tristement célèbres sous le nom “d’agent orange”. Leurs liaisons carbones bien solides les rendent trés difficilement biodégradables. Ici un homme qui “désherbe” un ruisseau qui apporte l’eau potable au village… Ces mollécules ont été inventées en synthétisant une hormone de croissance du riz… Selon le professeur Séralini qui a pu mener ses études financées par une fondation indépendente, à des doses 100 000 fois plus faibles que celles généralement utilisées par un jardinier, elles provoquent des nécroses sur les placentas des femmes enceintes.

Voila ce qui est utilisé ici pour désherber des mauvaises herbes. Notre mission ici est de montrer que ces fameuses mauvaises herbes ne sont pas forcément mauvaises, ni concurrentielles avec les cultures… Gérées autrement elles peuvent devenir des alliées des cultures. Et tout cela pourquoi? pour planter un soja (OGM) qui a été modifié pour résister à ces produits… et au bout de 3ans voila le rendement de ce soja après 25 jours depuis le semis: pas plus haut que les pauvres herbes “concurrentes” qui ont été aspergées 3 fois de produits; une pousse de soja tous les 50cm…

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En Argentine le prix de ces produits a augmenté de 25% en 2008 et on s’attend à une augmentation supérieure pour 2009… dépenser tant d’argent pour arriver à des résultats aussi médiocres… En tout cas à cet endroit, l’expérience n’est pas concluante. Inutile de vous préciser que les insectes, champignons et plantes médicinales du haut de la page ont été photographiés dans les sites indemnes de tout traitement, en amont de ces champs.

L’Argentine est l’un des plus grands consommateurs de ces produits chimiques. Aujourd’hui, 60% de la viande argentine provient de “feed-lot”, élevages confinés, nourris en partie de soja et de mais OGM. En Janvier 2009, le gouvernement argentin a demandé aux autorités médicales et universitaires de Buenos Aires de faire un rapport sur l’impact de ces produits sur la santé au niveau national.